Emmanuel Macron a décidé ce jeudi de suspendre cette année la chasse à la glu pour les grives et les merles. Cette interdiction peut-elle entraîner celle de la chasse au Grand Tétras, espèce endémique des Pyrénées ?
En matière de chasse au Grand Tétras, les décisions des tribunaux administratifs viennent très régulièrement et systématiquement contrer les arrêtés des préfectures qui l’autorisent, qu’elles soient de l’Ariège, des Pyrénées-Orientales ou des Hautes-Pyrénées. La raison : l’espèce ne présente pas un bon état de conservation.
Opportunisme politique ?
Jusqu’ici l’Etat refuse de prendre acte de ces jugements à répétition. Le vent est-il train de changer ? Pas sûr, estime Hervé Hourcade de la FNE. “Interdire la chasse à la glu nous apparaît plutôt un acte opportuniste vis-à-vis de l’opinion publique à qui la maltraitance animale parle de plus en plus“.
La FNE a fait parvenir très récemment une lettre, co-signée par une dizaine d’autres associations, à la nouvelle ministre de la transition écologique Barbara Pompili. “C’est toujours les mêmes arguments, poursuit Hervé Hourcade : la reproduction est plus ou moins bonne selon les années mais une chose est certaine :
La population du Grand Tétras n’est pas en effectif suffisant pour permettre qu’il soit chassé.
Un point de vue auquel s’oppose le président de la fédération de chasse des Hautes-Pyrénées, Jean-Marc Delcasso. “La chasse au Grand Tetras n’est pas une chasse traditionnelle. Rien à voir. Elle est ouverte comme celle du sanglier ou du lièvre et certaines régles la régissent. Ce n’est pas comme la chasse à la glu qui m’apparaît d’ailleurs d’un autre temps”.
“On a une gestion adaptative. Quand l’indice de reproduction est bon, c’est-à-dire quand les comptages permettent d’établir que les femelles ont une moyenne supérieure à un jeune par gestation, on ouvre la chasse. Sinon nous sommes les premiers à dire que ce n’est pas possible“.
Le dérangement incriminé
Pour le représentant de la fédération, les chasseurs ne prélèvent que quelques animaux, moins d’une dizaine, chaque année, dont des jeunes qui n’auraient probablement pas échappé à la prédation durant l’hiver. Il estime que le dérangement par les randonneurs ou les aménagements des stations de ski sont bien plus dommageables à l’espèce.
Ce que ne nie pas la FNE, même si elle inclut les chasseurs dans le lot… “La chasse est loin d’être l’unique cause de dérangement des Grands Tétras : la sur-fréquentation des espaces de montagne, l’extension des stations de ski lui nuisent fortement. C’est une espèce très sensible au dérangement. Si vous passez pas très loin d’un nid, vous faîtes échec à la reproduction”.
Menaces multiples
“La mortalité vient aussi des câbles électriques, des pylones, des clôtures, du braconnage, de la prédation d’autres espèces, poursuit Hervé Hourcade, car la gestation et l’élevage se font au sol. Cette espèce est fragile pour ces diverses raisons. Elle est endémique, c’est-à-dire qu’on ne la trouve que dans les Pyrénées. Alors pourquoi, en plus, venir la chasser, sans parler du dérangement que constituent les coups de feu pour les autres oiseaux ?”.
La population de Grand Tétras qu’on appelle aussi grands coqs de Bruyère est de 2.000 individus dans les Pyrénées. “Elle a baissé de 70% entre 1960 et 2009, déplore de son côté le président de la FNE, Thierry de Noblens. Et là, elle est encore en train de baisser : moins 8% au cours des dix dernières années“.
“Pourquoi croyez-vous que depuis 12 ans les tribunaux de Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Marseille nous donnent raison ? s’insurge-t-il. D’après le Conseil d’Etat, on n’a pas le droit de chasser un seul Grand Tétras. Elisabeth Borne, précédente ministre de la transition écologique, avait ordonné le gel de la chasse dans les Hautes-Pyrénées, la Haute-Garonne et l’Ariège mais elle s’est fait tordre le bras par les préfets via leurs directeurs de territoires, mis sous pression par les chasseurs. Voilà comment les choses se passent en France“.
Evidemment, le président de la chasse des Hautes-Pyrénées ne partage pas :
Si on ne maintient pas la chasse au Grand Tétras, c’est ça qui le tuera !”
“Rien que notre fédé met 150.000 euros par an dans sa gestion, poursuit le chasseur. Avec des gyrobroyeurs, nous rouvrons des milieux qui ne cessent de se fermer à cause du déclin du pastoralisme“.
“Cela nous permet d’ouvrir des clairières avec des graminées, de maintenir des zones de nichage où pousse les rhododendrons. On fait des comptages qui permettent d’évaluer la population de plus en plus menacée par les sangliers qui s’attaquent aux oeufs et aux poussins“.
Logique d’affrontement
Jean-Marc Delcasso estime qu’il ne pourra pas justifier, auprès de ses chasseurs, le maintien de ce budget si la chasse est interdite. “Je ne serai pas le fossoyeur de cette espèce, clame-t-il. Au contraire, c’est l’espèce-type où on voit que la gestion peut apporter à la conservation”.
Jean-Marc Delcasso, président de l’Observatoire national des galifformes de montagne, un organisme qui rassemble chasseurs, représentants de l’administration et associations, se dit près à tendre la main aux organisations écologistes. “Je ne souhaite pas qu’on reste dans cette logique d’affrontement”, explique-t-il. On peut développer une chasse intelligente, c’est le mode de chasse de l’avenir”.
Un éternel recommencement ?
Un voeu pieu que ne goûte pas la FNE. “Si les chasseurs aimaient le Grand Tétras, on les aurait avec nous pour le protéger !” rétorque Thierry de Noblens. Et de citer le parking du plateau de Beille, place de 10 Grand Tétras décimés par les travaux ou encore l’extension de la station de ski d’Ax-les-Thermes.
“Ils ne sont jamais à nos côtés pour protéger ces habitats. Au contraire, ils publient sur nous des papiers extrêmement violents, dénonce Thierry de Noblens. Dans le cas d’Ax, la justice nous a donné raison mais trop tard, les travaux étaient faits. Si on se battait avec eux pour protéger les milieux à grand tétras, cela fait longtemps qu’on ne contesterait plus systématiquement les arrêtés préfectoraux“.
Alors, le débat va-t-il progresser ou va-t-on assister, comme c’est le cas depuis plus de 10 ans, à la promulgation d’arrêtés préfectoraux autorisant la chasse, aussitôt attaqués par les associations de défense du Grand Tétras et retoqués par la justice ? On en saura plus dans les jours qui viennent car cette chasse peut être autorisée de la fin septembre à la mi-novembre.
Qui met de l’argent pour protéger et sauver le grand tétras ?Les fédérations de CHASSEURS ! Ouverture de milieux , signalisation des câbles des remontées mécaniques , qui demande et obtient parfois qu’une piste de ski de fond fasse un détour pour éviter une place de chant ? Les chasseurs , encore une fois ! Nous attendons toujours l’aide de FNE et des assos “escrologistes” pour ce genre d’actions .
J’ai chassé pendant des années le grand tétras et je puis assurer que ce ne sont pas les chasseurs qui ont mis à mal l’effectif . Par contre la martre protégée elle se régale des oeufs du tétras , la pénétration des skieurs , des randonneurs en montagne , le changement climatique , sont eux responsables directs de la baisse de ce “géant” des Pyrénées .
En complément des réflexions de Michel. J’ai plus de vingt ans de comptage avec la fédération de l’Isère sur le petit gibier de montagne. Le mois d’août donne le départ des comptages du petit-gibier de montagne (Perdrix bartavelle et Tétras-lyre) à l’aide de chiens d’arrêt. Ces comptages, rappelons-le, permettent aux chasseurs de recenser le nombre de couvées et de poussins de l’année et ainsi, d’établir le succès de reproduction des oiseaux. Ces données constituent une base de travail à la constitution du plan de chasse (prélèvement annuel nécessaire pour chaque espèce) ; plan de chasse établi en collaboration avec l’État, les agriculteurs, les forestiers, les scientifiques et les naturalistes. Pour procéder à ces comptages, les Fédérations Départementales des Chasseurs s’appuient toujours sur leurs bénévoles.
Aujourd’hui on assiste a un retour assez intéressant de la Bartavelle. Par conte sur le tétra lyre sur les zones chassées mais non pratiquées par le tourisme d’été et d’hivers on a des oiseaux en quantité correcte. Sur les secteurs touristique on a un net régression. Sauf sur des secteurs comme le massif de Belledone ou les stations de ski on fait un gros travail de protection.